Depuis 3 ans, le Département de l’Essonne organise avec ses partenaires, une semaine d’animations et de rendez-vous professionnels sur le thème de l’amélioration de l’habitat et de la rénovation énergétique. Dans le cadre de cette 3ème édition, le CAUE 91 a organisé la visite d’un chantier de réhabilitation et d’extension d’un groupe scolaire à Grigny, mettant en œuvre une isolation thermique par l’extérieur avec de la paille. La preuve, par l’exemple, que la rénovation énergétique du parc immobilier des années 1970 peut se faire avec des matériaux locaux, plus vertueux que ceux que l’on voit habituellement dans ce type d’opération.
Présentation du contexte
Le groupe scolaire Paul Langevin-Jean Perrin a été construit en 1972 par l’architecte André Sogorb au sein d’un quartier résidentiel de la même époque (quartier des Tuileries). Il est constitué d’un ensemble de trois bâtiments dont l’architecture est caractéristique de ces années : une structure poteau-dalle béton (trame 3,9 x 3,8 m), des hauteurs sous-plafond importantes et de grandes fenêtres.
En 2021, dans le cadre du Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain du secteur Grigny 2, la ville a lancé un concours pour sa réhabilitation et sa transformation. En effet, il ne répondait plus aux besoins démographiques du quartier (actuels et futurs). Sa fonctionnalité et ses performances thermiques avaient par ailleurs besoin d’être améliorées.
Le projet de réhabilitation du groupe scolaire
L’agence Dumont Legrand architectes a imaginé un projet permettant de redonner du confort, de la fonctionnalité, mais aussi de la lisibilité à ce groupe scolaire.
Précisons que l’existant comprenait non seulement l’école, mais aussi des logements en étage (dans la partie centrale) et des bureaux de l’inspection Académique de l’Essonne. On se retrouvait ainsi avec deux bâtis scolaires, coupés l’un de l’autre, et reliés uniquement par le rez-de-chausée.
A l’issue du chantier de réhabilitation et d’extension, il n’y aura plus qu’un seul programme, avec plus de place pour l’école, le périscolaire, la restauration collective… L’ensemble des niveaux sera reconnecté, via la création d’une coursive (que l’on a pu voir sur le chantier) qui fluidifiera les circulations intérieures. Enfin, les extensions (en structure bois) permettront de traiter les différents accès et de créer de meilleures conditions d’accueil.
Les choix techniques
Conformément aux ambitions de la maîtrise d'ouvrage, l'équipe de maîtrise d'oeuvre s'est attachée à déployer une approche frugale en recourant à des matériaux biosourcés, au recyclage et au réemploi de matériaux. Lors de la visite du chantier, nous avons ainsi pu observer les façades du groupe scolaire en cours d’isolation thermique avec de la paille francilienne. La paille n’est cependant pas visible. Elle est arrivée encapsulée à l’intérieur de murs à ossatures bois (MOB) qui ont été préfabriqués à moins de 30 km du chantier (dans les ateliers Méha à Valenton).
En revanche, nous avons pu observer les différentes étapes de la mise en œuvre sur chantier : les MOB avec isolation paille intégrée (bottes de 22 cm) sont plaqués sur les façades bétons existantes, puis doublés d’un isolant en fibre de bois (8 cm d’épaisseur) qui servira de support à un enduit à la chaux (2 cm), teinté en rose ou blanc.
On apprend sur le chantier, que les MOB mis en œuvre en rez-de-chaussée, cachent un isolant différent (de la fibre de bois de 22 cm). La raison n’est pas thermique, mais liée aux épaisseurs courantes des matériaux et aux finitions choisies, qui diffèrent entre RDC et étage. Pour le RDC, les architectes ont en effet choisi de mettre en œuvre un bardage béton (panneaux minces en ductal), plus robuste aux chocs que l’enduit chaux, et mieux adapté à cet endroit.
L’écriture architecturale
Pour être complet sur les interventions en façade, précisons que les menuiseries extérieures existantes, en PVC (des années 2000), sont en cours de remplacement par de nouvelles fenêtres, en aluminium, plus performantes et qualitatives. Ces nouvelles fenêtres sont déplacées au nu intérieur du mur à ossature bois, afin d’éviter les ponts thermiques, mais aussi l’effet “doudoune” que l’on observe souvent dans la mise en œuvre d’isolation par l’extérieur (sur-profondeur de l’embrasement de la fenêtre).
La rénovation du parc immobilier des années 1970 conduit parfois à la banalisation du bâti, quand ce qui faisait la qualité de l’existant n’est pas compris. Le projet de Dumont Legrand architectes, au contraire, montre une réhabilitation soucieuse de conserver les marqueurs du projet initial (les volumétries, la trame, les grandes ouvertures) tout en proposant une réécriture contemporaine des façades.
Le réemploi et la pédagogie auprès des enfants
Nous voudrions mettre en valeur un autre élément intéressant de ce projet : la démarche de réemploi, qui a été portée et valorisée par la commune. De nombreux éléments du bâti existant sont ainsi conservés : sols, sanitaires, vasques, faux-plafond… (ce qui nécessite à la fois un inventaire précis par les architectes en amont, un accord des bureaux de contrôle, et une protection adéquate pendant le chantier).
D’autres éléments qui n’ont pas pu être réemployés ont servi de matière première pour un projet pédagogique mené l’été dernier avec les enfants (accueillis dans des modulaires jouxtant le site). Une permanence architecturale a ainsi été mise en place avec la présence sur site 1 fois par semaine minimum (pendant 6 mois) d’un architecte-doctorant, Alexis Desplats, animant des ateliers de médiation et de sensibilisation. Il y a été question du chantier et des métiers de la construction, bien-sûr, de ses matériaux, de réemploi et de recyclage. Les enfants y ont aussi imaginé des projets pour leur cour de récréation provisoire et voté pour leur préféré : un labyrinthe fabriqué à partir des anciennes portes de l’école. Ils l’ont construit au mois de juin 2024 avec des outils traditionnels (ne nécessitant pas d’électricité) comme des tarières, vilebrequin, chignoles et scies japonaises et y ont pris beaucoup de plaisir (le CAUE présent lors d’un temps d’atelier peut en témoigner). L’objet final n’était pas tout a fait homologué car construit avec des matériaux ayant déjà eu une vie. Il a été réparé à plusieurs reprises par Alexis l’architecte médiateur et les enfants, soucieux de son entretien. En mars 2025, il n’en restait qu’une bande active mais le pari pédagogique de ce chantier en herbe était déjà largement rempli.
Retrouvez la vidéo pour avoir accès à l’historique complet !
Groupe scolaire Paul Langevin – Jean Perrin, 14 avenue des Tuileries 91350 Grigny
Maître d’ouvrage : Ville de Grigny
Maître d’oeuvre : Dumont Legrand Architectes (mandataire) ; Quadriplus Groupe (BET TCE) ; Atelier Jours (paysagiste) ; BEGC (cuisiniste) ; CPC (OPC) ; APAVE (bureau de contrôle, SPS) ; BEFSI (SSI)
Entreprises : DFD (désamiantage) ; DUBOCQ (démolition – GO) ; MEHA (charpente) ; FEHR (bardage béton) ; MPO (MEXT) ; EPCM (serrurerie) ; BTMF (ravalement) ; Ecobat77 (couverture étanchéité) ; P.BOUGET (MINT, sol, mur, cloison, doublage, FP, peinture) ; ORONA (ascenseurs) ; BANTIN (CVC PB) ; Bouygues énergies services (electricité) ; Alpha Cim (GTB) ; Azolis (photovoltaïque) ; STRF (VRD) ; Froid 77 (cuisine) ; Chadel (aménagements paysager, mobilier) ; Marty Sport (équipements sportifs)
Programme : Réhabilitation et extension du groupe scolaire vers 5 classes de maternelles, 19 classes de primaires, une restauration scolaire, un service périscolaire. Et construction d’un city-stade couvert sur le terrain attenant à l’école.
Surface : 4250 m2 SU
Coût : 11 M euros (compris city-stade)
Calendrier : Chantier en cours. Livraison mi-2026.
CAUE DE L'ESSONNE
3 rue des Mazières
Clos de l'Agora
91000 Évry-Courcouronnes
Tel : 01 60 79 35 44
